Il est temps de réinvestir pour répondre aux besoins éducatifs croissants
Le financement de l’éducation dans les situations d’urgence (ESU) est loin de répondre aux besoins des millions d’enfants et de jeunes touché·e·s par les crises dans le monde et qui ont besoin d’un soutien éducatif.
Telle est la conclusion d’un nouveau rapport publié le 16 juin 2022 par le Hub mondial de Genève pour l’ESU lors d’un événement organisé par les missions permanentes de la Suisse et du Niger auprès de l’ONU à Genève. Le rapport fournit, pour la première fois, une évaluation complète des multiples sources de financement de l’ESU, mettant en lumière les tendances et les lacunes.
En 2021, le financement humanitaire pour l’ESU a atteint le niveau record de 807 millions de dollars. Mais, avec des besoins qui augmentent encore plus vite en raison des conflits, du changement climatique et de la pandémie de COVID-19, cela n’a pas suffi à offrir à des millions d’enfants une éducation sûre, inclusive et de qualité.
Dans l’ensemble des appels humanitaires lancés par l’ONU, le secteur de l’éducation n’était financé qu’à hauteur de 22 % en 2021, soit la moitié de ce qu’il était en 2018. Malgré davantage de sensibilisation autour du problème, l’ESU continue d’être un secteur sous-financé des réponses humanitaires.
“En tant que communauté mondiale, nous nous sommes engagé·e·s à réaliser l’ODD-4 garantissant le droit à l’éducation pour tous les enfants et les jeunes. Pourtant, la réalité est que nous prenons actuellement du retard dans la réalisation de cet objectif”, a déclaré Patricia Danzi, directrice générale de la Direction du développement et de la coopération (DDC). “Dans ce contexte, je ne saurais trop insister sur l’importance de ce nouveau rapport qui fait le point sur l’état actuel du financement mondial de l’éducation dans les situations d’urgence. Ce rapport phare offre des pistes de solutions pour combler l’important déficit de financement de l’ESU.”
Le rapport propose plusieurs actions à mettre en place pour répondre au manque de financement de l’ESU.
Le suivi du financement de l’ESU doit être amélioré afin de mieux informer les décisions sur l’utilisation optimale des ressources limitées. L’étude recommande la création d’une plateforme publique rassemblant toutes les sources de données existantes sur l’ESU.
Une approche plus conjointe entre le financement humanitaire et l’aide au développement en faveur de l’ESU est également nécessaire. L’aide publique au développement pour l’éducation dans les pays en crise a atteint 5,7 milliards de dollars en 2020, soit plus de huit fois le niveau de l’aide humanitaire. Une plus grande coordination entre tous les acteurs humanitaires et de développement dans le secteur de l’éducation est indispensable pour s’assurer que les fonds disponibles limités pour l’ESU soient affectés là où ils sont le plus nécessaires.
“Trop souvent, le financement de l’éducation est orienté vers des crises qui font l’objet d’une couverture médiatique importante ou qui sont géopolitiquement stratégiques pour les donateur·trice·s”, a déclaré l’auteur du rapport, Damian Lilly. “Il faut faire davantage pour remédier aux inégalités et à l’imprévisibilité du financement de l’éducation, afin que tous les enfants aient accès à l’éducation qu’ils méritent.”
Alors que les Nations unies accueilleront le Sommet sur la transformation de l’éducation (TES) en septembre, il est nécessaire de renforcer l’engagement politique en faveur de l’ESU. Ces recommandations pour le financement de l’ESU seront importantes dans la perspective de la prochaine “conférence de haut niveau sur le financement” (HLFC), organisée par Education Cannot Wait (ECW), dont la directrice, Yasmine Sherif, a annoncé la tenue en février 2023. Il sera demandé aux donateur·trice·s de prendre des engagements spécifiques pour financer l’ESU, et les recommandations de ce rapport devraient se refléter dans ces engagements.
“Nous appelons les dirigeant·e·s mondiaux·ales, les donateur·trice·s, le secteur privé et les fondations philanthropiques à s’engager urgemment pour répondre à cette crise de grande envergure”, a déclaré Sherif. “Investir aujourd’hui dans l’éducation des filles et les garçons pris·e·s dans des crises et des urgences prolongées, c’est investir dans les rêves et les espoirs de chacun de ces enfants, et dans un monde de demain plus pacifique, prospère et humain. Sans un financement supplémentaire substantiel, prévisible et flexible pour augmenter immédiatement le soutien à une éducation de qualité sûre, continue et inclusive pour les filles et les garçons pris dans les contextes de crise les plus difficiles, nous n’atteindrons ni l’objectif de développement durable 4 (ODD), ni les autres ODD.”
Il est clair que les besoins de financement de l’ESU augmentent, et que l’écart entre ces besoins et les ressources disponibles se creuse. De nouveaux engagements en faveur du financement de l’ESU sont essentiels pour relever ce défi, tout comme les solutions innovantes et collaboratives qui font un meilleur usage du soutien existant.