L’éducation dans les situations d’urgence dans l’action anticipée et la première intervention d’urgence

“Nous voulons encourager les gens à comprendre comment ces questions s’influencent – elles peuvent être soit des défis composés, soit des avantages composés. Il s’agit de savoir comment nous choisissons d’investir, et de choisir les bons investissements pour obtenir un rendement beaucoup plus élevé.” – Lisa Bender, consultante principale sur la préparation, IASC Global Education Cluster

L’action anticipée (AA) – qui englobe un ensemble de mesures planifiées et préfinancées prises lorsqu’une catastrophe est imminente, avant un choc ou avant que les impacts aigus ne se fassent sentir – représente une occasion importante de mettre en pratique la coopération entre les acteurs humanitaires et de développement. Elle garantit que les investissements en matière de développement sont protégés et peuvent répondre aux chocs.

Loin d’être une entreprise ou un secteur nouveau, l’AA fait partie intégrante de la gestion des risques de catastrophes, de l’adaptation et de la résilience. Ainsi, l’éducation doit, sans aucun doute, constituer l’un des éléments fondamentaux de l’action anticipée. Considérer l’éducation comme un élément clé de l’AA permettrait de répondre aux besoins fondamentaux et de faciliter la récupération, tout en fournissant des services éducatifs vitaux.

Un panel d’intervenant·e·s de World Vision International, de l’Institut international de planification de l’éducation (IIPE) de l’UNESCO, de l’Alliance mondiale pour la réduction des risques de catastrophes et la résilience dans le secteur de l’éducation (GADRRRES) et de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR) ont partagé leur expertise lors d’un événement organisé par le Hub mondial de Genève pour l’ESU dans le cadre de la Semaine des partenariats des réseaux humanitaires (HNPW) 2022. La discussion a été ouverte par Frédérique Lehoux de la Mission permanente de la Suisse auprès de l’ONU. Elle a insisté sur la nécessité de tirer parti de l’action anticipée et de l’ESU, en soulignant le rôle des enfants eux-mêmes en tant qu’agents de changement dans l’action anticipée, et a abordé le manque de familiarité de nombreux acteurs du domaine humanitaire avec les possibilités de le faire : “En tant que communauté, nous avons un long chemin à parcourir pour libérer le potentiel de l’action anticipée pour l’éducation. Nous devons investir davantage dans ce domaine, et nous espérons que cette session est une contribution modeste mais importante à cette fin.”

Un des thèmes récurrents chez tous les intervenant·e·s était la nécessité de soutenir les systèmes qui permettent l’engagement et l’appropriation au niveau local dans la prise de décision concernant la préparation.

“À World Vision, jusqu’à présent, nous avons vu le travail d’action anticipée émaner organiquement de nos programmes, plutôt que d’être imposé par le haut, au niveau global”, a déclaré Marco Grazia, directeur mondial, protection de l’enfance et de l’éducation dans les situations d’urgence à World Vision International. “Nous avons envisagé la question non pas uniquement du point de vue du secteur de l’éducation, mais d’un point de vue intersectoriel – en se demandant comment nous pourrions fournir une éducation, de concert avec l’eau, l’assainissement et l’hygiène (WASH), et avec les interventions de protection de l’enfance.”

Son collègue Mesfin Jonfa, de World Vision Ethiopie, a parlé d’une initiative visant à atténuer l’impact humanitaire d’une sécheresse prolongée sur la fréquentation scolaire, en évitant les potentiels abandons causé par cette situation par le biais de transferts d’argent liquide, intégrés à la protection de l’enfance, à la formation des enseignant·e·s et à l’eau et l’assainissement. “Cela a impliqué l’établissement d’un plan d’action, avec un financement préétabli et l’évaluation des interventions les plus efficientes et les plus efficaces”, a-t-il déclaré. “Mais même si une équipe d’ESU dispose d’un excellent plan de préparation, elle doit également toujours assurer la sensibilisation et l’engagement au niveau local pour que ce plan soit bien mis en œuvre.”

“La coordination à tous les niveaux, au sein des ministères et entre les ministères, est essentielle”, a déclaré Leonora Mac Ewen, spécialiste du programme, UNESCO IIPE. “Les procédures opérationnelles standard doivent clarifier les rôles et les responsabilités du niveau national jusqu’au niveau de l’école – en évitant les lacunes et les doublons.”

Lisa Chung Bender, Sr. Consultante en préparation, IASC Global Education Cluster et ancienne présidente du GADRRRES dans le secteur de l’éducation, a approuvé et expliqué que ces considérations étaient au cœur du Comprehensive School Safety Framework (CSSF). “Le CSSF s’articule autour des responsables ; il s’agit d’identifier les personnes sur le terrain, et de déterminer qui est responsable de quoi”, a-t-elle déclaré. “Mais cela signifie que nous devons nous assurer que nous faisons ce qu’il faut pour renforcer les capacités de tous ces responsables – enseignant·e·s, parents, enfants eux-mêmes. Cela nous a poussés à sortir de notre zone de confort, à examiner comment l’éducation est affectée par différents risques et défis, et comment nous pouvons y faire face.”

“Faire participer les communautés peut être véritablement bénéfique et efficace – si nous nous assurons que cela est fait de manière inclusive et que nous cherchons à obtenir leur contribution de manière significative”, a déclaré Audrey Oettli, coordinatrice de la protection de l’enfance dans les situations d’urgence à la FICR. “Cela garantit que nous répondons aux besoins identifiés par la communauté, et qu’il y a une appropriation – en particulier par les enfants et les jeunes.”

Amjad Saleem, responsable de l’inclusion, de la protection et de l’engagement à la FICR, qui a modéré la discussion, a conclu en résumant la relation tripartite entre les données et les preuves, le leadership politique et la coordination intersectorielle. “Nous avons besoin de bonnes données et de preuves qui nous aideront à faire valoir nos arguments, et à obtenir un engagement politique et des financements – qui, à leur tour, seront influencés par de meilleures données et preuves, qui, elles, proviennent d’une meilleure coordination. Nous ne pouvons pas nous permettre de garder les informations encloisonnée par secteur.”