Les gouvernements et les principales parties prenantes ont défini des réponses nationales pour répondre aux actions prioritaires, lors de la dernière journée du pré-sommet des Nations unies sur la transformation de l’éducation.
30 JUIN, PARIS – Les ministres et vice-ministres de l’éducation de 154 pays et près de 2000 participant·e·s se sont réuni·e·s au siège de l’UNESCO à Paris pour discuter de la transformation de l’éducation, inspiré·e·s par le cri de ralliement des jeunes.
Le pré-sommet, qui précède le sommet des chef·fe·s d’État sur la transformation de l’éducation, convoqué par le secrétaire général des Nations unies à New York en septembre, intervient deux ans après le début de la plus grande perturbation de l’apprentissage de l’histoire, causée par la pandémie de COVID-19. Il vise à soutenir une percée mondiale vers des avenirs plus durables et pacifiques, comme le préconise le rapport “Notre programme commun”.
Il s’agit de s’attaquer à la fois à la perte d’éducation et aux profondes failles structurelles des systèmes éducatifs dans le monde. À mi-chemin de l’échéance fixée pour la réalisation de l’Objectif de développement durable 2030 en matière d’éducation, les participants sont catégoriques : le monde doit non seulement se remettre sur les rails, mais aussi transformer l’éducation de fond en comble.
Les dirigeant·e·s politiques, de nombreux jeunes militant·e·s, des expert·e·s, la société civile et le secteur privé ont exprimé leur détermination à passer d’une réforme de l’éducation à sa transformation. Il·elle·s se sont concentré·e·s sur les axes clés que sont l’inclusion, la qualité de l’apprentissage, le rôle de l’enseignant·e, la connectivité numérique et un financement adéquat et innovant.
Le pré-sommet a débuté par un Forum de la jeunesse réunissant des jeunes militant·e·s et des représentant·e·s dont les voix et les idées seront déterminantes pour le dénouement du sommet.
La vice-secrétaire générale de l’ONU, Amina J. Mohammed, a insisté sur le fait qu’il fallait construire différemment à l’avenir. Elle a appelé les jeunes à se mobiliser pour construire un mouvement global au niveau national pour la transformation de l’éducation.
Pour clore les débats, M. Mohammed a mis en avant la voie à suivre jusqu’au sommet : “Lorsque les chef·fe·s d’État viendront à l’ONU en septembre, il faudra qu’il·elle·s réfléchissent directement au système éducatif qu’il·elle·s envisagent pour l’avenir et des engagements qu’il·elle·s peuvent prendre maintenant pour y parvenir – et de la façon dont il·elle·s peuvent assurer cette transformation grâce à leurs efforts pour stimuler la reprise, accélérer les ODD et réimaginer l’éducation pour l’avenir.”
Soulignant l’objectif de transformation comme principe directeur du Sommet, le président de l’Éthiopie et président de la Commission internationale de l’UNESCO sur l’avenir de l’éducation, Sahle-Work Zewde, a appelé au “renforcement du dialogue public et à une participation plus inclusive qui associe celles et ceux qui sont souvent exclu·e·s”. La Commission a publié une déclaration au pré-sommet sur l’élaboration d’un nouveau contrat social pour l’éducation, proposant cinq directions pour le changement.
Le président de la Sierra Leone, Julius Maada Bio, a insisté sur le fait que l’éducation est un droit fondamental : “Nous devons utiliser ce pré-sommet de manière stratégique pour rallier toutes les forces en faveur d’une éducation de qualité et inclusive et d’un apprentissage tout au long de la vie pour toutes et tous. Nous le faisons parce que l’éducation n’est pas un privilège. C’est un droit humain fondamental. Nous plaidons collectivement pour que l’éducation ne soit pas un coût mais un investissement dans un avenir durable pour nos sociétés, nos enfants et la planète.”
La directrice générale de l’UNESCO, Audrey Azoulay, a tiré la sonnette d’alarme sur la crise mondiale de l’éducation, soulignant que ses racines profondes sont bien antérieures à la pandémie : “au début de 2020, avant la pandémie, 259 millions d’enfants n’étaient pas scolarisés, soit un sixième de la population mondiale de cette tranche d’âge. Et il y avait plus de 770 millions d’adultes analphabètes, dont deux tiers de femmes, ce qui reflète des inégalités persistantes. Mais cette situation a été aggravée par la pandémie”. Azoulay a appelé à une révolution de l’éducation – notamment pour répondre aux enjeux de la transformation numérique et du changement climatique.
Le Comité directeur de haut niveau (HLSC), responsable de la coordination et du suivi de l’ODD-4 à l’échelle mondiale, devra assurer le suivi des actions au-delà du sommet, notamment en contribuant à la dimension éducative du Sommet de l’avenir en 2023. Co-présidé par le président de la Sierra Leone et le directeur général de l’UNESCO, le HLSC a lancé un appel urgent aux chef·fe·s d’État et de gouvernement pour que l’éducation figure en tête de l’agenda politique.
S’adressant à une salle remplie de décideur·euse·s, la représentante des jeunes du Comité directeur de haut niveau de l’ODD-4, Kenisha Arora, a fait valoir que l’éducation est le fondement du changement : “Lorsque les gens sont éduqués, la société se transforme. L’alphabétisation financière devient la liberté financière et le développement économique. L’alphabétisation numérique devient une transformation numérique. L’alphabétisation climatique devient l’action climatique.”
Les stratégies visant à garantir l’apprentissage numérique et à étendre la connectivité ont été abordées tout au long des dialogues, au vue de l’usage massif de technologies lors de la pandémie de COVID-19, qui a mis en évidence les inégalités. Rien qu’en Afrique subsaharienne, seuls 43 % de la population a accès à l’internet. Les pays ont fait part d’initiatives en cours visant à mettre en place des systèmes scolaires résistants aux crises en fournissant des appareils à l’Afrique du Sud, à l’Égypte, à l’Éthiopie, au Ghana, au Kenya et au Sénégal, et en développant des applications d’alphabétisation à faibles ressources.
Aider les enseignant·e·s à devenir des facilitateur·trice·s et des guides pour une nouvelle façon d’apprendre a également été reconnu comme un impératif clé pour réimaginer les systèmes éducatifs. En amont du pré-sommet, la Conférence régionale des ministres de l’éducation de la région Asie-Pacifique a fait du développement d’une génération d’enseignant·e·s hautement qualifié·e·s un élément clé de la réalisation de sa priorité, à savoir la transformation de l’éducation et des systèmes éducatifs, soulignant la nécessité de mettre en place des politiques visant à attirer des enseignant·e·s qualifié·e·s.
Les dialogues ont mis l’accent sur l’amélioration des fondamentaux de l’apprentissage et sur la question de l’apprentissage tout au long de la vie, en passant par l’ensemble des besoins et des priorités en matière d’éducation. En Amérique latine et dans les Caraïbes, l’accent a été mis sur le rétablissement de l’apprentissage, ce qui inclut la réintégration des enfants et des jeunes qui ont quitté l’école ou qui ne sont plus scolarisé·e·s, la mise en place de systèmes d’alerte précoce pour aider et identifier les élèves à risque, ainsi que l’élaboration de politiques pour servir les personnes dont la scolarité n’est pas terminée.
Le financement de l’éducation est en crise depuis longtemps. Cette crise a par ailleurs été aggravés par les coûts supplémentaires causés par l’apprentissage perdu.
L’accent a été mis sur l’élargissement de la base de revenus pour l’éducation, en intensifiant l’action sur la fiscalité, la pression de la dette et d’autres défis, notamment pour les pays en développement.
Jutta Urpilainen, commissaire européenne chargée des partenariats internationaux, a exhorté la communauté internationale à “continuer à intensifier ses investissements. Malgré les tensions géopolitiques, nous ne pouvons pas prendre de retard sur les engagements d’aide à l’éducation.” L’Union européenne fournit plus de la moitié de l’aide publique au développement en faveur de l’éducation dans le monde. La Commission a décidé d’augmenter son budget consacré à l’éducation de 7 à 13%.
Gordon Brown, envoyé spécial des Nations unies pour l’éducation dans le monde, a exhorté les décideur·euse·s à mobiliser des investissements plus importants dans l’éducation à partir de toutes les sources possibles – et a appelé les donateur·trice·s et les banques de développement multilatérales à aider à rendre opérationnelle la “Facilité internationale de financement pour l’éducation à temps pour le sommet”.
Catherine Russell, directrice générale de l’UNICEF, a rappelé les bienfaits de l’apprentissage, même dans les contextes les plus difficiles : “Quiconque ayant déjà vu des enfants allant à l’école dans des camps de réfugié·e·s, ou des filles recevant un enseignement informel dans des endroits qui ne leur permettraient pas d’aller à l’école, ou encore des enfants handicapés – les plus exclus de tous – en classe avec leurs camarades, a pu constater leur joie et leur enthousiasme pour l’apprentissage.”
Récemment nommé conseiller spécial du secrétaire général des Nations unies pour le sommet, Leonardo Garnier a insisté sur le rôle de la jeunesse dans la transformation : “Le monde change quand nous le changeons. Les jeunes n’ont pas besoin de demander la permission pour avoir un espace. Si vous ne l’avez pas encore, prenez-le. Si vous ne pouvez pas le prendre, faites-le!”
Les gouvernements sont invités à consolider leurs consultations nationales en vue du Sommet de septembre, où les chef·fe·s d’État et de gouvernement annonceront leurs engagements nationaux en faveur de la transformation de l’éducation. Les résultats du Sommet alimenteront le Sommet de l’avenir, une étape majeure dans l’avancement de “Notre programme commun”.
Pour plus d’informations, visitez le site web du Sommet sur la Transformer de l’éducation.